Comme son nom le suggère, cette comédie théâtrale tourne autour d’un mot, ou plutôt de sa signification pour Marianne, qui a consacré toute sa vie au théâtre sans jamais connaître le succès et les salves d’applaudissements qu’elle espérait tant. Nous la découvrons donc, proche de l’âge de la retraite, en train de ranger ses affaires pour quitter la salle qu’elle a tenté de faire vivre pendant plus de 4 décennies et qu’elle a décidé de céder à une jeune troupe enthousiaste. En cette veille de signature de l’acte de vente, elle reçoit la visite d’André, son ami de toujours, qui reçoit cette nouvelle comme une sorte de coup de poignard, après avoir été présent à quasiment chacune de ses représentations.
Ensemble, en cette circonstance nostalgique, ils vont se remémorer leur rencontre et les années qui l’ont suivie. Ce qui les transporte très en arrière, dans les années 1940, en pleine période d’occupation. Alors que son caractère autoritaire et intransigeant vient de faire démissionner ses comédiens et qu’elle se retrouve seul avec son costumier Félix (Christopher Diafuku, excellent en couturier un peu maniéré), sa vie va prendre en quelques minutes un tournant décisif, alors qu’elle découvre 4 Juifs qui se sont introduits dans la salle pour fuir une rafle, et que, quelques minutes plus tard, débarque un membre de la Gestapo, dont le frère jumeau est venu la veille contrôler l’identité des membres de la troupe (les 2 sosies étant incarnés par Damien Buffet, campant avec beaucoup de conviction teintée d’un brin de comique ces soldats irascibles). Soucieuse de sa tranquillité, elle voudra d’abord les faire partir avant de laisser sa sensibilité parler et de les engager comme comédiens.
Au cours des 4 années qui vont suivre, elle va donc leur apprendre d’abord les rudiments, puis tout le savoir qu’elle a acquis. Elle apprendra ainsi à la très sensuelle Charlotte (Manel Kalifa) à modérer sa féminité et explorer la sobriété. Elle ne ménagera pas non plus ses efforts pour lisser l’accent marseillais de David (Thomas Pelikan), et fera de son mieux pour aider André (Adel Benchikh) à dépasser sa timidité maladive. Mais surtout, elle développera une relation à la fois tendue et empreinte de respect et d’admiration avec Paul Baptista (Pierre-Yves Redouté), un homme tout aussi revêche qu’elle, dont elle perçoit tout de suite le potentiel en tant que comédien et avec lequel elle sera aussi dure qu’admirative de ses progrès. C’est cette relation qui est au cœur de ce flashback, les 4 autres membres de cette troupe d’un genre particulier n’ayant jamais compris pourquoi ils ne s’étaient jamais revus depuis la Libération.
Si vous voulez percer le mystère, il vous faudra aller les découvrir au théâtre. Et vous ne regretterez certainement pas de faire la connaissance de cette jeune troupe sympathique, portée par Claire Giuseppi, à la fois auteure et metteuse en scène, qui incarne le rôle de Marianne avec un talent bien supérieur à celui qu’elle attribue à son personnage. A l’instar des techniques transmises par Marianne à Paul, elle cherche aussi à communiquer sa passion mordante pour le théâtre à travers les très jolies scènes de répétition. En assistant à ce spectacle, il se pourrait bien ainsi que vous ayez envie d’applaudir en scandant des « bravi », et il se pourrait aussi que les « Serges » (le nom de la troupe) apprécient.
Plus d’infos :
- Bravo, jusqu’au 24 juin 2018, le vendredi et le samedi à 20h, le dimanche à 18h30
- A la Folie Théâtre, 6 rue de la Folie Méricourt, 75011 Paris
- http://www.folietheatre.com/?page=Spectacle&spectacle=280&PHPSESSID=5bfc2ac655c40a176f1f066ec34c3f29
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